Le bail commercial et ses subtilités

Pratico-pratique

Vendredi 25 octobre 2019
Présenté par
Vous êtes emballé à l’idée que votre PME ou votre start-up ait bientôt pignon sur rue ? Il faudra penser à de l'aide pour votre bail commercial... Surtout si vous en êtes à votre première expérience.

Il vous proposera même d’analyser, avant que vous n’y apposiez votre signature, ce document qui compte souvent une cinquantaine de pages, parfois même davantage. Cet investissement vous évitera de commettre des erreurs beaucoup plus coûteuses, car le bail commercial contient de nombreuses subtilités qui pourraient avoir une incidence sur le développement de votre entreprise.

Les baux commerciaux ne tombent pas sous la gouverne de la Régie du logement. Par conséquent, le propriétaire de l’immeuble est libre d’imposer ses conditions, pourvu que soient respectées les règles d’ordre public. En cas de litige, il faudra se tourner vers les tribunaux.

Bail brut ou bail net

Diverses formules décrivent les baux commerciaux : le bail brut, le bail net, le bail double net et le bail triple net. Le propriétaire impose généralement la formule qui représente le moins de risques financiers pour lui, et le locataire qui tient au local convoité est contraint de s’y plier.

Le locataire qui signe un bail brut paie un loyer fixe mensuel qui comprend tous les frais, même si les dépenses du propriétaire augmentent. Ce peut être le cas, par exemple, du dépanneur installé au rez-de-chaussée d’une tour à bureau, qui n’occupe qu’une faible surface de l’immeuble.

S’il s’agit d’un bail net, un loyer de base est fixé, et le locataire contribue, en proportion de la superficie qu’il occupe, à certaines charges relatives à l’immeuble, notamment les taxes foncières et scolaires. Le signataire d’un bail double net paie en outre une portion de l’assurance de l’immeuble qui correspond, encore une fois, à la superficie qu’il occupe. Le bail triple net va plus loin encore : le propriétaire envoie à l’ensemble de ses locataires une facture mensuelle ou annuelle – selon ce qui est prévu au bail – pour couvrir toutes les dépenses liées à l’immeuble, qu’il s’agisse des taxes foncières ou du déneigement, du lavage des vitres ou de la réparation de la toiture. La somme est donc totalement imprévue et la facture établie en proportion de l’espace que chaque locataire occupe. « L’entreprise qui loue pour y installer un commerce de détail occupant tout le rez-de-chaussée, et dont l’état de la façade de l’immeuble peut influer sur son chiffre d’affaires, peut préférer assumer sa part des autres dépenses et ainsi avoir son mot à dire quant à la qualité de l’entretien et des réparations à effectuer », explique Me Nicolas Brabant, de BAA Avocats.
 

Prévoir les options de renouvellement et de cession du bail

Signé pour une première tranche de trois ans, le bail mentionne généralement une ou plusieurs options de renouvellement. L’augmentation annuelle des options de renouvellement doit être déterminée ou déterminable selon un calcul inscrit noir sur blanc dans le bail, insiste Me Brabant, qui constate trop souvent que des locataires ont accepté une clause qui dit simplement « loyer à négocier de bonne foi au renouvellement ». Mais comment être assuré que le propriétaire sera de bonne foi ? Aucun montant ou pourcentage n’étant indiqué, il pourrait vous imposer une augmentation substantielle, s’il constate que votre commerce est prospère. Vous serez alors coincé : soit vous acceptez l’augmentation, soit vous déménagez, au risque de perdre une partie de votre clientèle, sans compter les frais liés au déménagement et à l’installation dans un nouveau local.

« Contrairement au propriétaire d’un logement résidentiel, le propriétaire d’un local commercial ne peut le reprendre pour usage personnel, à moins qu’une telle clause soit prévue dans le bail, souligne Me Richard Drapeau, dont l’étude notariale est située à Sherbrooke. Le propriétaire ne peut, non plus, refuser à son locataire le droit de céder son bail sans motif sérieux, à moins d’une clause dans le bail à l’effet contraire. »

Un tribunal pourrait cependant invalider une telle clause en s’appuyant sur l’article 1871 du Code civil du Québec, qui stipule : « Le locateur ne peut refuser de consentir à la sous-location du bien ou à la cession du bail sans un motif sérieux. »

Par ailleurs, selon l’article 1873, la cession de bail décharge l’ancien locataire de ses obligations, à moins que les parties se soient entendues autrement. Afin d'éviter tout malentendu avec le propriétaire, il est également possible d'ajouter une clause au bail commercial précisant la libération des obligations du locataire advenant une cession de bail.

Dépôt de sécurité, cautionnement personnel et hypothèque immobilière

À la signature du bail, le propriétaire exige un dépôt de sécurité qui varie habituellement entre un et trois mois de loyer, et qui pourrait être remboursé graduellement avant la date du renouvellement. La relation de confiance étant établie, aucun dépôt n’est généralement exigé ou conservé par la suite. Le propriétaire peut aussi demander un cautionnement de la part des administrateurs ou des dirigeants de la société, qui s’engagent alors à assumer personnellement les obligations du locataire, si celui-ci ne peut les respecter. Il pourrait également souhaiter prendre une hypothèque mobilière sur les biens qui sont sur les lieux.

« Cette option est cependant rare, convient Me Brabant, le s biens en question étant souvent déjà donnés en garantie à la banque en premier lieu, et l’entreprise préfère ne conserver que le prêteur à titre de créancier garanti. »

Publier son bail, un incontournable

Comme il n’existe pas de bail commercial type, contrairement au bail résidentiel imposé par la Régie du logement, toutes les clauses sont possibles.

« Oui, toutes les clauses sont possibles, pourvu qu’elles ne soient pas contraires à une disposition d’ordre public, nuance Me Drapeau. Par exemple, le propriétaire ne peut retirer au locataire le droit d’inscrire son bail au Bureau de la publicité des droits du Québec. »

Le propriétaire peut toutefois exiger que seul un sommaire du bail – durée et options de renouvellement – soit publié et qu’il puisse d’abord l’approuver. Le locataire peut renoncer à son droit de publier les termes du bail, mais cette publication le protège en cas de vente de l’immeuble, car l’acheteur sera alors tenu de respecter ces termes. Autrement, il pourrait être évincé moyennant préavis. Les frais d’inscription au Registre foncier sont d’une centaine de dollars, auxquels il faut ajouter ceux d’un juriste qui, en vertu du Code civil du Québec, doit obligatoirement attester l’exactitude du contenu.
 

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